Les non-Russes sur la ligne de front. Qui se bat et meurt pour le “paix russe” en Ukraine?

Les non-Russes sur la ligne de front. Qui se bat et meurt pour le “paix russe” en Ukraine?

Aujourd’hui, le 2 mars, Ilnur Sibagatullin a été enterré à Nizhnekamsk. Le ressortissant tatare est mort à la guerre en Ukraine, bien que Rustam Minnikhanov, le président du Tatarstan, ne l’ait pas précisé dans son message de condoléances. Les experts ont attiré l’attention sur le nombre disproportionné de noms non slaves parmi les morts et les prisonniers de guerre.

Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les sources ukrainiennes ne cessent d’écrire sur les pertes et les soldats russes capturés. La partie russe ne donne pas de chiffres, se contentant d’admettre la mort de militaires individuels. L’état-major ukrainien affirme que 5 840 soldats russes ont été tués depuis le début des hostilités. Il est impossible de vérifier l’authenticité de ces informations.

Par exemple, le chef du Daghestan, Sergey Melikov, a confirmé la mort de l’officier Nurmagomed Gadzhimagomedov, originaire du Daghestan. Le 28 février, le chef de la Kalmoukie, Batu Khasikov, a reconnu la mort en Ukraine d’un natif de la république, Konstantin Mandzhiyev, un sergent contractuel. Selon Khasikov, Mandzhiyev est également mort “lors d’une opération militaire spéciale visant à protéger le Donbass”.

Le 1er mars le président du Tatarstan Roustam Mannikhanov a exprimé ses condoléances  pour la mort d’Ilnur Sibgatullin, un soldat dans Nizhnekamsk. Minnikhanov n’a pas précisé le lieu de sa mort, mais sa déclaration laisse entendre qu’il s’agissait de l’Ukraine.

Le chef de la Mordovie Artem Zdunov a déclaré que Viktor Isaykin, originaire du village d’Erzya de Chukaly, était mort au cours des activités militaires en Ukraine.

Le gouverneur de l’Oblast d’Astrakhan, Igor Babuchkin a également noté sur la mort d’Arman Narynbayev, un militaire du district de Krasnoyarsk.

Il y a eu des rapports de personnes tuées dans d’autres régions de Russie également, notamment dans les régions de Kirov, Samara, Penza et Ulyanovsk, mais au moins au cours de la première semaine de la guerre, le nombre de minorités ethniques de Russie (ou de peuples autochtones de Russie, à l’exclusion des Russes) tuées en Ukraine (officiellement reconnues comme telles par les autorités régionales russes) se distingue par une proportion disproportionnée.

Le 27iem février, l’enquêteur Christo Groziev a également déclaré que, selon ses données, la proportion de soldats russes tués qui ont combattu en Ukraine était élevée parmi les représentants de groupes non slaves.

“La plupart de ses soldats sont les jeunes de groupes ethniques non slaves. C’est-à-dire, donc probablement que des personnes originaires de régions éloignées ont été envoyées en première ligne…”, a déclaré l’enquêteur. 

Selon les données du recensement de population panrusse en 2010, tous les groupes ethniques non russes de Russie représentent ensemble un peu moins de 20 % de la population de pays.

Le sujet a été développé par l’expert en politique Abbas Galliamov. Il a écrit un message sur sa page Facebook:

“Franchement, je ne sais même pas comment je dois estimer cette situation. D’un part, je ne peux pas vraiment imaginer la personne, qui pourrait donner tel ordre cynique. L’ordre de voler d’argent réservé pour l’achat des tomographes — oui; l’ordre de truquer les élections — oui; l’ordre d’envoyer des “tchurquis” (un surnom péjoratif), en les désignant comme une catégorie spéciale, comme “chair à canon” — non. D’autre part, je comprends, que le   plan, en supposant qu’il y en ait vraiment un, est tout à fait réalisable. Disons, qu’un avis d’obsèques soit arrivé dans un village yakoute reculé, disons, que la mère rende noirci par le chagrin, disons, que des villageois saoulent pendant le repas funéraire — et alors? Ils n’ont pas de contacts dans “Vkontakte”, mais même s’ils en ont un, ils n’ont pas l’habitude d’y écrire quoi que ce soit, et ils n’ont même pas l’habitude de tirer des conclusions politiques”, a-t-il déclaré.

Toutefois, l’expert a ajouté qu’il ne croyait pas vraiment à tout cela. Selon lui, “les tchékistes locaux surveillent de près les sentiments dans les communautés ethniques”.

“…C’est juste le truc de Poutine, il a très peur des nationalistes”, a-t-il dit.

Galliamov pense que beaucoup de gens dans les républiques nationales croiront cette information.

“Ne serait-ce que parce que le niveau de confiance envers Moscou est minime ici, Moscou a détruit le fédéralisme et l’autonomie locale, elle exporte l’argent des régions et elle a essentiellement enterré l’enseignement des langues nationales dans les écoles. L’information selon laquelle la capitale “chasse notre peuple à l’abattoir” reposera sur un terrain préparé”, écrit l’expert en politique.

Malgré le silence des officiels russes sur le nombre total de victimes, de nombreux rapports de Russes tués ou capturés apparaissent sur les chaînes Telegram, principalement en Ukraine. Souvent, vous pouvez voir ou entendre les noms des Russes dans ces postes.

“Idel.Realii” a analysé les messages de plusieurs chaînes Telegram qui publiaient des informations sur les Russes tués ou capturés et a constaté qu’environ 30 % des noms traités appartenaient clairement à des représentants de groupes non russes, dont une part importante de noms d’origine musulmane.

“Idel.Realii” a examiné les informations concernant 107 militaires russes représentés dans les canaux Telegram. Ce nombre ne comprend pas les “Kadyrovites”. Dans ce dernier cas, la part des “non-Russes” pourrait augmenter. Les médias ukrainiens ont rapporté que le 26 février, les forces armées ukrainiennes avaient détruit un groupe d’attaque tchétchène dont l’objectif était “d’éliminer le président ukrainien Volodymyr Zelensky”. Des informations sur la mort de militaires tchétchènes en Ukraine, dont deux commandants d’unité, ont été démenties par le chef tchétchène Ramzan Kadyrov, selon le journal Kavkazsky Knot (reconnu en Russie comme “agent étranger”).

Outre cette caractéristique nationale, il convient également de noter que de nombreux Russes tués ou capturés (parmi ceux dont les détails ont été vérifiés par “Idel.Realii”) proviennent de villages, de régions éloignées et d’entités nationales au sein de la Fédération de Russie.

L’avion transportant le corps d’Ilnur Sibagatullin, mentionné ci-dessus, est arrivé au Tatarstan aujourd’hui, 2 mars, après avoir été retardé de plusieurs heures. Le soldat a déjà été enterré dans sa patrie.

Plus tôt, le mufti suprême de Russie, Talgat Tadzhuddin, a approuvé la décision de Poutine d’introduire des troupes en Ukraine.

L’administration spirituelle des musulmans du Tatarstan a publié un commentaire sur l’Ukraine, affirmant que “après le coup d’État, le pays est aux mains des néonazis, dont souffrent les musulmans, entre autres”.

Dans le même temps, l’administration a appelé à “prier pour le bien-être dans chaque maison” et a souhaité “bien-être et prospérité au peuple ukrainien”.

L’administration spirituelle des musulmans de l’Ukraine condamne l’invasion des troupes russes et demande à Poutine d’arrêter la guerre.

Le chef spirituel des musulmans russes, le Mufti Sheikh Ravil Gaynutdin, a, à son tour, prononcé un discours dans lequel il a appelé toutes les personnes de bonne volonté à prier pour que la paix soit établie en Ukraine.

“Idel.Realii”

Корреспондент

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